5 diapasons - Un ensemble qui aime les lignes de tension

01/10/2023
Diapason - Benoît Fauchet
Le Moine et le Voyou

« Il y a chez Poulenc du moine et du voyou » : on connait la formule du critique Claude Rostand. Convient elle à son cadet Bernard Cavanna ? Léo Warynski le suggère, qui associe les deux compositeurs français. Le choeur est a cappella chez Poulenc. Rien de très « voyou » dans les pages choisies, les plus profanes se lisant le temps d’Un soir de neige sur des poèmes d’Éluard ; dans ce paysage floconneux, il faut s’habituer à un effectif qui accentue les syllabes et roule ses « r », s’épanouissant surtout dans le « froid brûlant » refermant la cantate. Les Métaboles ne cherchent pas à arrondir les angles et aplanir les reliefs des Quatre motet pour un temps de pénitence, miniatures coloristes que le compositeur voulait « aussi réalistes et tragiques qu’une peinture de Mantegna ». La jubilation archaïsante et carillonnante d’Exultate Deo sied à cet ensemble qui ne craint pas la lumière vive et aime les lignes de tension.

Le choeur est rejoint pas l’ensemble instrumental Multilatérale pour un défi nettement plus expressionniste : la Messe un jour ordinaire de Cavanna qui dynamite et enfouit la liturgie latine sous un déluge de décibels (fanfare, cloche, orgue, accordéon… et voix dont trois soliste). Elle confronte le sacré à la banalité poignante des répliques d’une femme toxicomane fraîchement sortie de prison. Le compositeur a revu sa partition (créée en 1994) en y ajoutant une toccata introductive et en remodelant ses lignes chorales sur les possibilités d’un groupe professionnel dont a lecture supplante sans difficultés celle gravée par Philippe Nahon avec des ensemble vocaux.